Lettre politique de la députée du FFS Salima Ghezali au général Major Gaid Salah
DIA-13 août 2018: Alors qu’en principe c’est un chef de parti qui interpelle le chef de l’armée Gaid Salah sur la situation politique du pays, c’est une députée du parti du feu Ait Ahmed Salima Ghezali, qui est sorti de son cabinet noir pour reprendre sa plume et rédiger une longue missive pour « répondre » au chef de l’Etat major. Il est clair que cette lettre politique est longuement réfléchie et validée à Lausanne. En attendant d’y revenir en détail et en analyse, nous vous livrons l’intégralité de la lettre politique de Salima Ghezali au Général de corps d’armée Ahmed Gaid Salah.
« Ce
système autoritaire et corrompu, que vous défendez, s’acharne à
désorienter la société, détruire le politique et coloniser le militaire
Monsieur le vice-ministre de la défense nationale,
Le 30
juin dernier vous avez baptisé du nom du chahid Abane Ramdane l’annexe
de l’Académie militaire de Cherchell et lui avez rendu un hommage
posthume en présence de membres de sa famille.
L’initiative
est appréciable mais elle reste marquée du sceau du formalisme
protocolaire qui, trop souvent, sert à masquer le refus, méthodique et
constant, de situer les problèmes relatifs à notre Histoire, passée,
présente et future, dans le cadre naturel qui est le leur : le cadre
politique.
Quoique
disent les analphabètes politiques et les affabulateurs : On édifie,
renforce, affaiblit, perd ou reconquiert les Etats et les Nations pour
des raisons politiques. C’est l’essence même du message du Congrès de la
Soummam.
On
aurait pu croire qu’à l’occasion de cet évènement qui s’est tenu à la
veille de la célébration de l’Indépendance Nationale le 5 juillet, et
en prévision des anniversaires de l’Insurrection du 20 aout 55 et du
Congrès de la Soummam, l’hommage rendu à l’un des principaux architectes
de cette halte fondamentale du cours de la Révolution nationale pouvait
augurer d’une prise de conscience par le haut commandement militaire de
la pertinence historique des principales recommandations du congrès du
20 AOUT 56.
D’autant
que les dates marquantes de la Révolution nationale devraient être,
aujourd’hui que des générations d’algériens sont au fait de la
complexité du monde moderne et de l’ampleur des défis à relever pour ne
pas en être violemment éjectés, célébrées et discutées loin des passions
premières et des limites de perception de certains des acteurs d’hier.
Et tout aussi loin des célébrations creuses.
Mais
votre discours en cette occasion n’a pas fait mention de la formidable
percée stratégique dans l’élaboration de la pensée et de l’action
patriotiques modernes que signifiaient, objectivement, les
recommandations de ce congrès qui s’est tenu, quelques mois seulement
après le lancement de la lutte armée pour l’Indépendance nationale, dans
un pays en guerre, laminé à tout point de vue, mais plus
particulièrement dans ses structures politiques et ses archaïsmes
sociaux et culturels, pervertis en des atavismes sclérosés par plus
d’un siècle de colonisation barbare. Le défi relevé par les
congressistes de la Soummam était colossal.
Offrir
à un pays ravagé par la prédation et par le mépris érigé en culture de
gouvernance, une plate-forme de lutte et un programme de construction
collective de l’alternative à la prédation et au mépris, n’est-ce pas là
un défi que les élites patriotiques doivent de tout temps apprendre à
relever ?
Vous
semblez penser que les structures dirigeantes des institutions
actuelles, civiles et militaires, sont aujourd’hui entre les mains
d’hommes disposant des compétences, de la hauteur de vue, de
l’intégrité morale et de l’abnégation capables d’offrir au pays, face
aux défis de l’heure, une feuille de route qui redonne espoir au peuple,
unité d’action à ses élites et cohérence globale .
Nombreux
sont les algériens à en douter. D’autant que les scandales, par leur
multiplication, laissent penser que la déviance est devenue la règle.
Comme l’illustre dramatiquement l’affaire de la cocaïne-gate où hauts
fonctionnaires de l’Etat, magistrats, généraux-majors et vulgaires
truands parviennent à unir dans le crime fonctions militaires et
fonctions politiques pour détourner à leur profit les richesses
nationales. Pendant des années. Dans l’impunité la plus totale. Et la
grande sieste des institutions chargées de veiller à la sécurité des
biens et des personnes.
Il est
manifeste, aujourd’hui, que s’inspirer de la grandeur de la révolution
est encore plus nécessaire que d’en célébrer les dates.
Moment révolutionnaire par excellence, le Congrès de la Soummam a doté la lutte armée, déclenchée par l’Appel du 1er
Novembre54, des instruments indispensables à son déploiement
méthodique et organisé sur l’ensemble du territoire national par la
primauté du politique sur le militaire et de l’Intérieur sur
l’Extérieur. De même qu’y ont été réaffirmées ses orientations
stratégiques : L’Indépendance Nationale en vue de la construction d’un
Etat démocratique et social dans le respect des principes islamiques.
Votre
auditoire, et l’opinion publique nationale, méritaient d’entendre autour
de cet évènement un propos de niveau égal à celui véhiculé par les
canaux de communication spécialisés, civils et militaires, amis ou
ennemis, qui abreuvent quotidiennement les algériens de théories
diverses sur leur propre histoire.
Partant
de la connaissance objective des bouleversements que connait la scène
politique mondiale et du développement contemporain des principes
énoncés par le congrès de la Soummam, vous pouviez démontrer en quoi le
génie de la pensée révolutionnaire algérienne était fondateur de
modernité, politique autant que militaire, et gage de pérennité pour
l’Etat.
Il
était même possible, pour éclairer les défis du présent à la lumière des
conquêtes du passé, de procéder à une analyse comparée entre le
développement de la pensée militaire moderne par les généraux et
stratèges américains à partir des années 80, sous ce qui est appelé la
G4G, guerre de quatrième génération, et les carences politiques,
économiques et sociales des systèmes de pouvoir ayant été ciblés par «
les révolutions colorées » et autres « printemps arabes » ces dernières
années. Ce faisant, et pour rendre un hommage à hauteur de leur génie,
mettre en exergue la formidable construction immunitaire contre ce type
de déstabilisation contenue, potentiellement, dans la pensée stratégique
de la Révolution algérienne.
A
commencer par l’organisation militaire moderne selon les critères d’une
armée régulière, le primat du politique y était réaffirmé, pour
distinguer L’armée de Libération Nationale, au service de la cause
nationale, d’une simple milice.
Le but
de la lutte était l’affirmation de la souveraineté du peuple algérien
sur son territoire et sur ses richesses par L’Indépendance Nationale.
Le
projet politique était la construction d’un Etat démocratique, donc
respectant le pluralisme intrinsèque au mouvement national.
Cet
Etat démocratique se devait également d’être social pour prendre en
charge de manière organisée le développement économique et culturel du
pays et de l’ensemble de ses composantes, dont les plus nombreuses, les
couches populaires.
Et
ceci dans le cadre des principes islamiques, qui sont le référent
religieux et culturel dans lequel se reconnait la majorité du peuple
algérien.
Par ailleurs, la plate-forme de la Soummam n’omet pas de rappeler le respect des libertés religieuses et de conscience.
Autant dire que pour des pans entiers du peuple algérien ce Programme reste encore terriblement d’actualité.
Ni
Prophètes ni magiciens, les rédacteurs de la plate-forme de la Soummam
ont forgé leur génie stratégique en étudiant l’histoire des faits
objectifs de leur pays et du monde. Tirant les leçons, politiques
d’abord, organisationnelles et militaires ensuite, de la diversité des
expériences de la résistance algérienne à l’invasion coloniale, de ses
nombreux échecs autant que de ses quelques succès.
Vous
auriez pu, en mettant en valeur l’intelligence politique, l’audace
stratégique et le génie militant qui les caractérisaient, rendre
l’hommage qu’ils méritaient aux héros de la Révolution Nationale tout en
soulignant l’exemplarité universelle de leur projet patriotique.
Hélas,
dans votre discours du 30 juin, il n’est fait nulle part mention de
cette étape cruciale dans la marche vers la Libération du peuple
algérien. L’incantation poético-religieuse et la rhétorique généraliste
l’emportent largement sur la pensée stratégique. Sans surprise.
Le
gap cognitif entre les exigences stratégiques des penseurs de la
Révolution nationale et les insuffisances des discours officiels actuels
n’est pas sans lien avec la rupture brutale avec les idéaux de la
Révolution que l’assassinat de Abane Ramdane a opérée au beau milieu de
la guerre d’Indépendance.
Dès ce
moment, l’usage de la brutalité et les anathèmes, derrière les
déclarations creuses et lénifiantes à destination du public, vont
neutraliser l’exigence des critères d’excellence, le respect des règles
de droit et du principe de collégialité et de débat, pour installer
résolument un groupe de dirigeants dans une position de pouvoir usurpé,
le doter d’un « corps de contrainte » sur l’ensemble de la révolution et
le dispenser du besoin de communiquer pour éclairer, former,
convaincre, organiser et juger.
Mais
seulement pour leurrer, embrigader et promouvoir des vassaux d’une part
et marginaliser, stigmatiser et condamner des récalcitrants d’autre
part.
La
première série de finalités du discours produit des militants politiques
et permet de construire un Etat de droit et une société moderne
constituée de citoyens conscients, libres et organisés, guidés par
l’ambition individuelle légitime dans le respect des règles et des lois
ainsi que par le souci de l’intérêt commun bien compris.
La
deuxième série (leurrer, embrigader, marginaliser, stigmatiser et
condamner) ne peut fabriquer que des clients et des vassaux fonctionnant
à la peur et à l’allégeance et mus par l’appât du gain et des intérêts
indus.
Ou des rebelles en rupture, à des degrés divers, avec ce qui n’est plus qu’un pouvoir s’exerçant par la force.
Il est
heureux, malgré les entraves internes qui s’ajoutaient à la machine de
guerre adverse, et malgré le prix terrible payé par le peuple algérien
et par son élite, que les militants les plus conscients aient continué à
irriguer la pensée nationale et la lutte politique et militaire,
vaille que vaille, de toute l’énergie de leurs convictions inébranlables
jusqu’à la proclamation de l’Indépendance.
C’est
pourquoi la Révolution algérienne est indéniablement un grand projet de
libération collective qui reste encore largement à l’état de Projet,
aussi bien dans la conscience de ceux qui ne renoncent pas à le mener à
son terme, que pour ceux qui s’acharnent, depuis le début, à en
détourner le cours à leur seul profit.
C’est
là le nœud gordien de la crise de légitimité du système de pouvoir que
vit le pays et que les dirigeants, civils et militaires, s’obstinent à
nier.
Car
l’assassinat de Abane Ramdane et le silence sur les recommandations du
Congrès de la Soummam ont marqué une bifurcation majeure dans le cours
de la Révolution. Avec ce crime et l’organisation de l’amnésie, la
violence est venue imposer sa loi et ses dérèglements cycliques pour
contrarier le travail méthodique de construction ordonnée et politique
de l’Algérie moderne.
C’est
en lien avec cette distorsion du cours de l’Histoire que l’élite
nationale méritante est régulièrement sacrifiée sur l’autel de la
veulerie complaisante ou de la médiocrité prédatrice. Quand elle n’est
pas livrée au terrorisme.
C’est
aussi pour cela que la société, dont la seule conduite acceptable, aux
yeux du système de pouvoir en place, est la soumission et l’allégeance,
se trouve constamment désorientée et soumise à toutes les pressions et à
tous les chantages. De la dictature militaire et de la pensée unique
des années 70/80 à l’horreur du terrorisme des années 90 puis à
l’horreur de la prédation économique des années 2000-2018. Avec,
régulièrement, des piqures de rappel sur la possibilité toujours ouverte
d’un renouvellement du basculement dans la violence.
Un
autre dirigeant africain lucide et sincère dans son projet patriotique,
Thomas Sankara, a formulé le rapport du politique au militaire dans
cette phrase pleine d’enseignements pour qui veut ou peut apprendre :
« Un militaire sans formation politique n’est qu’un criminel en
puissance. » Il sera assassiné sur instigation des réseaux de la
Françafrique sous le règne de François Mitterand.
Les
militants qui ont formé les premiers noyaux militaires de l’OS, qui
deviendront ceux de l’ALN, étaient des militants politiques. L’ALN est
fille du FLN historique issu de décennies de lutte du mouvement
national. L’ANP est donc effectivement héritière de l’ALN comme le
rappellent tous les discours, mais en droite ligne du mouvement national
qui était constitué de militants politiques, cela on l’entend moins.
La
dualité entre politique et militaire sur laquelle on a tant glosé n’a
jamais été pertinente dans le cas de la Révolution algérienne. Elle
l’est encore moins aujourd’hui avec le développement de la pensée
stratégique, des technologies de la communication et de la globalisation
économique. La différence majeure, qui reste plus pertinente que
jamais, est entre militant politique et soldat.
Un
militant politique s’engage, prend l’initiative et lutte pour mettre en
œuvre un programme de gouvernement ou pour construire une alternative à
une situation de blocage ou d’oppression. Un soldat est enrôlé pour
appliquer des ordres.
Si le
Congrès de la Soummam, dont la majorité des congressistes étaient des
« militaires », a éprouvé le besoin de préciser la primauté du politique
sur le militaire, c’était pour prémunir la cause nationale des
dérives intempestives que des soldats, certains valeureux sur le terrain
de la guerre physique et des manœuvres tactiques mais limités
politiquement et totalement incapables de saisir les enjeux stratégiques
de la lutte, pouvaient occasionner pour des besoins de pouvoir
personnel ou d’ambitions démesurées.
Non
seulement vous n’avez pas jugé utile d’honorer la pensée des
congressistes de la Soummam en la développant, au moment de rendre
hommage à Abane Ramdane, mais en plus, quelques jours plus tard, vous
avez , par contre, jugé opportun de prendre part à une grotesque
opération politico-médiatique, comme sait si bien les organiser le
système, pour affirmer que l’ANP ne fera pas de coup d’Etat, qu’elle ne
fait pas de politique, qu’il n’était pas question pour elle d’interférer
dans les élections comme l’y invitent des partis qui « voudraient la
mêler… »etc.
Le
Général Zeroual, alors qu’il prenait ses fonctions à la tête de l’Etat,
avant son élection en 1996, avait qualifié de « système pourri » le
fonctionnement institutionnel et avait dénoncé « des traitres, criminels
et mercenaires » installés au plus haut niveau des structures de
l’Etat. Le propos avait pu choquer ceux qui pensaient que le seul
problème du pays était le terrorisme. A telle enseigne que devant la
levée de boucliers, quelques mois plus tard, le Président Zeroual
reprenait les mêmes termes pour les attribuer au seul terrorisme.
Première reculade avant qu’il ne remette, au nom de l’alternance (sic),
sa démission face à la pression du « système pourri ».
Depuis,
il n’a plus jamais été question d’alternance. Mais seulement de
« continuité » et de grotesques simulacres dans le simulacre où les
uns demandent à l’ANP de les débarrasser du Président et les autres s’y
opposent de toute la force de leur attachement à « l’Etat civil ».
En vérité, le coup d’état militaire est inenvisageable pour diverses raisons.
D’abord,
parce que la police politique, qui a façonné les rapports de force sur
l’actuelle scène publique, peut, elle ou ses relais mafieux, mener des
putschs dans toutes les structures politiques, syndicales, associatives
et même économiques et médiatiques. Elle a même façonné l’espace
publique d’une manière tellement perverse que les « coups de force »
sont devenus le mode de régulation quasi-automatique dans toutes les
structures. Il vous suffit de lire les journaux, avant même les BRQ pour
le constater.
Une
situation propice à la désorientation cognitive de citoyens qui, entre
le gourdin du parkingueur, le doberman du redresseur, la milice privée
du général, la vénalité du magistrat, la « chkara » des clones du
Bouchi, le « sale boulot » du commis de service, le cachet du
bureaucrate-racketteur et l’ukase de l’apparatchik, ne peuvent plus
trouver d’espace où faire librement société.
La
désintégration morale, politique et sociale de la collectivité nationale
exclut, de fait, la possibilité du « coup d’Etat militaire » pour
n’importe quel officier doté d’un peu de conscience patriotique ou même
de simple bon sens. La violence et la corruption ont rongé jusqu’à l’os
les structures de la société et de l’Etat. Au moindre geste inconsidéré
l’Algérie rattrapera au centuple le retard pris sur le Congo, la Libye
etc.
Dans
ces conditions parler de « menace de coup d’état militaire » est une
manœuvre de diversion pour faire accepter la fumisterie appelée tantôt
« Etat civil» et tantôt « continuité » qui n’est rien d’autre, en
l’état actuel du fonctionnement des institutions, que la raison sociale
de la corruption généralisée.
Voilà où nous a conduit le système. Nous le savons. Vous le savez. Ou devriez le savoir.
Il ne
reste, pour ceux que le sort du pays intéresse, qu’à reprendre les
idéaux patriotiques là où ils ont été abandonnés en même temps que la
Plate-forme de la Soummam et passer de manière ordonnée à la deuxième
République. Ou se condamner à, tôt ou tard, repasser par la case 1er Novembre.
Limite de caractères dépassée
5000/5000
Limite de caractères (5000) dépassée de 13463 :
ationale
en vue de la construction d’un Etat démocratique et social dans le
respect des principes islamiques.
Votre auditoire, et l’opinion publique nationale, méritaient d’entendre
autour de cet évènement un propos de niveau égal à celui véhiculé par
les canaux de communication spécialisés, civils et militaires, amis ou
ennemis, qui abreuvent quotidiennement les algériens de théories
diverses sur leur propre histoire.
Partant de la connaissance objective des bouleversements que connait
la scène politique mondiale et du développement contemporain des
principes énoncés par le congrès de la Soummam, vous pouviez démontrer
en quoi le génie de la pensée révolutionnaire algérienne était fondateur
de modernité, politique autant que militaire, et gage de pérennité pour
l’Etat.
Il était même possible, pour éclairer les défis du présent à la lumière
des conquêtes du passé, de procéder à une analyse comparée entre le
développement de la pensée militaire moderne par les généraux et
stratèges américains à partir des années 80, sous ce qui est appelé la
G4G, guerre de quatrième génération, et les carences politiques,
économiques et sociales des systèmes de pouvoir ayant été ciblés par «
les révolutions colorées » et autres « printemps arabes » ces dernières
années. Ce faisant, et pour rendre un hommage à hauteur de leur génie,
mettre en exergue la formidable construction immunitaire contre ce type
de déstabilisation contenue, potentiellement, dans la pensée stratégique
de la Révolution algérienne.
A commencer par l’organisation militaire moderne selon les critères
d’une armée régulière, le primat du politique y était réaffirmé, pour
distinguer L’armée de Libération Nationale, au service de la cause
nationale, d’une simple milice.
Le but de la lutte était l’affirmation de la souveraineté du peuple
algérien sur son territoire et sur ses richesses par L’Indépendance
Nationale.
Le projet politique était la construction d’un Etat démocratique, donc
respectant le pluralisme intrinsèque au mouvement national.
Cet Etat démocratique se devait également d’être social pour prendre en
charge de manière organisée le développement économique et culturel du
pays et de l’ensemble de ses composantes, dont les plus nombreuses, les
couches populaires.
Et ceci dans le cadre des principes islamiques, qui sont le référent
religieux et culturel dans lequel se reconnait la majorité du peuple
algérien.
Par ailleurs, la plate-forme de la Soummam n’omet pas de rappeler le
respect des libertés religieuses et de conscience.
Autant dire que pour des pans entiers du peuple algérien ce Programme
reste encore terriblement d’actualité.
Ni Prophètes ni magiciens, les rédacteurs de la plate-forme de la
Soummam ont forgé leur génie stratégique en étudiant l’histoire des
faits objectifs de leur pays et du monde. Tirant les leçons, politiques
d’abord, organisationnelles et militaires ensuite, de la diversité des
expériences de la résistance algérienne à l’invasion coloniale, de ses
nombreux échecs autant que de ses quelques succès.
Vous auriez pu, en mettant en valeur l’intelligence politique, l’audace
stratégique et le génie militant qui les caractérisaient, rendre
l’hommage qu’ils méritaient aux héros de la Révolution Nationale tout en
soulignant l’exemplarité universelle de leur projet patriotique.
Hélas, dans votre discours du 30 juin, il n’est fait nulle part mention
de cette étape cruciale dans la marche vers la Libération du peuple
algérien. L’incantation poético-religieuse et la rhétorique généraliste
l’emportent largement sur la pensée stratégique. Sans surprise.
Le gap cognitif entre les exigences stratégiques des penseurs de la
Révolution nationale et les insuffisances des discours officiels actuels
n’est pas sans lien avec la rupture brutale avec les idéaux de la
Révolution que l’assassinat de Abane Ramdane a opérée au beau milieu de
la guerre d’Indépendance.
Dès ce moment, l’usage de la brutalité et les anathèmes, derrière les
déclarations creuses et lénifiantes à destination du public, vont
neutraliser l’exigence des critères d’excellence, le respect des règles
de droit et du principe de collégialité et de débat, pour installer
résolument un groupe de dirigeants dans une position de pouvoir usurpé,
le doter d’un « corps de contrainte » sur l’ensemble de la révolution et
le dispenser du besoin de communiquer pour éclairer, former,
convaincre, organiser et juger.
Mais seulement pour leurrer, embrigader et promouvoir des vassaux d’une
part et marginaliser, stigmatiser et condamner des récalcitrants d’autre
part.
La première série de finalités du discours produit des militants
politiques et permet de construire un Etat de droit et une société
moderne constituée de citoyens conscients, libres et organisés, guidés
par l’ambition individuelle légitime dans le respect des règles et des
lois ainsi que par le souci de l’intérêt commun bien compris.
La deuxième série (leurrer, embrigader, marginaliser, stigmatiser et
condamner) ne peut fabriquer que des clients et des vassaux fonctionnant
à la peur et à l’allégeance et mus par l’appât du gain et des intérêts
indus.
Ou des rebelles en rupture, à des degrés divers, avec ce qui n’est plus
qu’un pouvoir s’exerçant par la force.
Il est heureux, malgré les entraves internes qui s’ajoutaient à la
machine de guerre adverse, et malgré le prix terrible payé par le peuple
algérien et par son élite, que les militants les plus conscients aient
continué à irriguer la pensée nationale et la lutte politique et
militaire, vaille que vaille, de toute l’énergie de leurs convictions
inébranlables jusqu’à la proclamation de l’Indépendance.
C’est pourquoi la Révolution algérienne est indéniablement un grand
projet de libération collective qui reste encore largement à l’état de
Projet, aussi bien dans la conscience de ceux qui ne renoncent pas à le
mener à son terme, que pour ceux qui s’acharnent, depuis le début, à en
détourner le cours à leur seul profit.
C’est là le nœud gordien de la crise de légitimité du système de pouvoir
que vit le pays et que les dirigeants, civils et militaires,
s’obstinent à nier.
Car l’assassinat de Abane Ramdane et le silence sur les
recommandations du Congrès de la Soummam ont marqué une bifurcation
majeure dans le cours de la Révolution. Avec ce crime et l’organisation
de l’amnésie, la violence est venue imposer sa loi et ses dérèglements
cycliques pour contrarier le travail méthodique de construction
ordonnée et politique de l’Algérie moderne.
C’est en lien avec cette distorsion du cours de l’Histoire que l’élite
nationale méritante est régulièrement sacrifiée sur l’autel de la
veulerie complaisante ou de la médiocrité prédatrice. Quand elle n’est
pas livrée au terrorisme.
C’est aussi pour cela que la société, dont la seule conduite acceptable,
aux yeux du système de pouvoir en place, est la soumission et
l’allégeance, se trouve constamment désorientée et soumise à toutes les
pressions et à tous les chantages. De la dictature militaire et de la
pensée unique des années 70/80 à l’horreur du terrorisme des années 90
puis à l’horreur de la prédation économique des années 2000-2018. Avec,
régulièrement, des piqures de rappel sur la possibilité toujours ouverte
d’un renouvellement du basculement dans la violence.
Un autre dirigeant africain lucide et sincère dans son projet
patriotique, Thomas Sankara, a formulé le rapport du politique au
militaire dans cette phrase pleine d’enseignements pour qui veut ou
peut apprendre : « Un militaire sans formation politique n’est qu’un
criminel en puissance. » Il sera assassiné sur instigation des réseaux
de la Françafrique sous le règne de François Mitterand.
Les militants qui ont formé les premiers noyaux militaires de l’OS, qui
deviendront ceux de l’ALN, étaient des militants politiques. L’ALN est
fille du FLN historique issu de décennies de lutte du mouvement
national. L’ANP est donc effectivement héritière de l’ALN comme le
rappellent tous les discours, mais en droite ligne du mouvement national
qui était constitué de militants politiques, cela on l’entend moins.
La dualité entre politique et militaire sur laquelle on a tant glosé
n’a jamais été pertinente dans le cas de la Révolution algérienne. Elle
l’est encore moins aujourd’hui avec le développement de la pensée
stratégique, des technologies de la communication et de la globalisation
économique. La différence majeure, qui reste plus pertinente que
jamais, est entre militant politique et soldat.
Un militant politique s’engage, prend l’initiative et lutte pour mettre
en œuvre un programme de gouvernement ou pour construire une alternative
à une situation de blocage ou d’oppression. Un soldat est enrôlé pour
appliquer des ordres.
Si le Congrès de la Soummam, dont la majorité des congressistes étaient
des « militaires », a éprouvé le besoin de préciser la primauté du
politique sur le militaire, c’était pour prémunir la cause nationale
des dérives intempestives que des soldats, certains valeureux sur le
terrain de la guerre physique et des manœuvres tactiques mais limités
politiquement et totalement incapables de saisir les enjeux stratégiques
de la lutte, pouvaient occasionner pour des besoins de pouvoir
personnel ou d’ambitions démesurées.
Non seulement vous n’avez pas jugé utile d’honorer la pensée des
congressistes de la Soummam en la développant, au moment de rendre
hommage à Abane Ramdane, mais en plus, quelques jours plus tard, vous
avez , par contre, jugé opportun de prendre part à une grotesque
opération politico-médiatique, comme sait si bien les organiser le
système, pour affirmer que l’ANP ne fera pas de coup d’Etat, qu’elle ne
fait pas de politique, qu’il n’était pas question pour elle d’interférer
dans les élections comme l’y invitent des partis qui « voudraient la
mêler… »etc.
Le Général Zeroual, alors qu’il prenait ses fonctions à la tête de
l’Etat, avant son élection en 1996, avait qualifié de « système pourri »
le fonctionnement institutionnel et avait dénoncé « des traitres,
criminels et mercenaires » installés au plus haut niveau des structures
de l’Etat. Le propos avait pu choquer ceux qui pensaient que le seul
problème du pays était le terrorisme. A telle enseigne que devant la
levée de boucliers, quelques mois plus tard, le Président Zeroual
reprenait les mêmes termes pour les attribuer au seul terrorisme.
Première reculade avant qu’il ne remette, au nom de l’alternance (sic),
sa démission face à la pression du « système pourri ».
Depuis, il n’a plus jamais été question d’alternance. Mais seulement de «
continuité » et de grotesques simulacres dans le simulacre où les uns
demandent à l’ANP de les débarrasser du Président et les autres s’y
opposent de toute la force de leur attachement à « l’Etat civil ».
En vérité, le coup d’état militaire est inenvisageable pour diverses
raisons.
D’abord, parce que la police politique, qui a façonné les rapports de
force sur l’actuelle scène publique, peut, elle ou ses relais mafieux,
mener des putschs dans toutes les structures politiques, syndicales,
associatives et même économiques et médiatiques. Elle a même façonné
l’espace publique d’une manière tellement perverse que les « coups de
force » sont devenus le mode de régulation quasi-automatique dans toutes
les structures. Il vous suffit de lire les journaux, avant même les BRQ
pour le constater.
Une situation propice à la désorientation cognitive de citoyens qui,
entre le gourdin du parkingueur, le doberman du redresseur, la milice
privée du général, la vénalité du magistrat, la « chkara » des clones du
Bouchi, le « sale boulot » du commis de service, le cachet du
bureaucrate-racketteur et l’ukase de l’apparatchik, ne peuvent plus
trouver d’espace où faire librement société.
La désintégration morale, politique et sociale de la collectivité
nationale exclut, de fait, la possibilité du « coup d’Etat militaire »
pour n’importe quel officier doté d’un peu de conscience patriotique ou
même de simple bon sens. La violence et la corruption ont rongé jusqu’à
l’os les structures de la société et de l’Etat. Au moindre geste
inconsidéré l’Algérie rattrapera au centuple le retard pris sur le
Congo, la Libye etc.
Dans ces conditions parler de « menace de coup d’état militaire » est
une manœuvre de diversion pour faire accepter la fumisterie appelée
tantôt « Etat civil» et tantôt « continuité » qui n’est rien d’autre,
en l’état actuel du fonctionnement des institutions, que la raison
sociale de la corruption généralisée.
Voilà où nous a conduit le système. Nous le savons. Vous le savez. Ou
devriez le savoir.
Il ne reste, pour ceux que le sort du pays intéresse, qu’à reprendre les
idéaux patriotiques là où ils ont été abandonnés en même temps que la
Plate-forme de la Soummam et passer de manière ordonnée à la deuxième
République. Ou se condamner à, tôt ou tard, repasser par la case 1er
Novembre.
Mais cela ne concerne pas votre génération ni son système. Ce ne peut
être l’affaire que de patriotes politiquement formés, techniquement
compétents et moralement intègres. A ce propos, vous avez raison quand
vous dites que le peuple algérien aime son armée. Mais vous n’avez
aucune idée du degré de détestation que ce même peuple algérien a pour
ces « Généraux d’Affaires », corrompus et corrupteurs, sans lesquels
jamais n’auraient pu proliférer les « Bouchi » au pays du million et
demi de chahids.
*Journaliste-écrivain, député FFS
مطار الدوحة الدولي 13 أغسطس 2018: في حين أنه من حيث المبدأ هو زعيم الحزب الذي يدعو قائد الجيش جيد صلاح على الوضع السياسي في البلاد ، فهو عضو في حزب الراحل أيت أحمد سليمة غزالي ، الذي ترك مجلس الوزراء الأسود لاستئناف قلمه وكتابة رسالة طويلة "للإجابة" لرئيس الأركان. من الواضح أن هذه الرسالة السياسية تعتبر طويلة ومصدقة في لوزان. بينما ننتظر العودة بالتفصيل والتحليل ، نقدم لك الرسالة السياسية الكاملة لسلمى غزالي إلى قائد الجيش أحمد قايد صلاح.
"هذا النظام الاستبدادي والفاسد ، الذي تدافع عنه ، يسعى إلى تشتيت المجتمع وتدمير السياسة واستعمار الجيش.
نائب وزير الدفاع الوطني ،
في 30 يونيو ، قمت بتسمية ملحق أكاديمية شيرشل العسكرية التي سميت شاهيد أبان رمضان ودفعت له تكريمًا بعد وفاته بحضور أفراد عائلته.
وتعد هذه المبادرة ملموسة لكنها لا تزال تحمل علامة ختم الشكلية البروتوكول الذي غالبا ما يعمل على إخفاء الرفض، منهجي ومستمر، من وضع مشاكل تاريخنا، في الماضي والحاضر والمستقبل، في بيئة طبيعية وهذا هو لهم: الإطار السياسي.
وعلى الرغم من أن الأميين السياسيين وأخصائيي التركيب يقولون: (1) يبني أو يعزّز أو يضعف أو يفقد أو يستعيد الدول والأمم لأسباب سياسية. هذا هو جوهر رسالة مؤتمر سومام.
كان يمكن للمرء أن يعتقد أنه بمناسبة هذا الحدث الذي عقد عشية الاحتفال الاستقلال الوطني في 5 يوليو ، وتحسبا لاحتفالات الذكرى السنوية من 20 أغسطس ، 55 ومؤتمر Soummam، وتكريما لأحد المهندسين الرئيسيين لهذا وقف الأساسي مسار الثورة الوطنية يمكن أن تبشر الوعي من قبل القيادة العسكرية العليا للأهمية التاريخية للالتوصيات الرئيسية للمؤتمر 20 أغسطس 56 .
لا سيما وأن التواريخ الرئيسية للثورة الوطنية يجب أن تكون اليوم ، اليوم الذي تدرك فيه أجيال الجزائريين تعقيدات العالم الحديث وحجم التحديات التي يجب مواجهتها حتى لا يتم قذفها بعنف ، وناقشت بعيدا عن المشاعر الأولى والحدود الإدراكية لبعض الجهات الفاعلة في الأمس.
وبعيدا عن الاحتفالات الفارغة.
لكن خطابك في هذه المناسبة لم يشر إلى الاختراق الاستراتيجي الهائل في تطوير الفكر والعمل الوطني المعاصر الذي كان يعني بموضوعية توصيات هذا المؤتمر الذي عقد قبل بضعة أشهر فقط. بعد إطلاق الكفاح المسلح من أجل الاستقلال الوطني في بلد في حالة حرب، وتوالت كل شيء، ولكن خصوصا في البنى السياسية والاجتماعية والثقافية المهجورة، منحرفة إلى الرجعية المتصلب بأكثر من واحدة قرن من الاستعمار الهمجي. كان التحدي الذي واجهه مندوبو سومام شديدًا.
لتقديم هذا البلد المدمر من الافتراس والاحتقار في ثقافة الحكم ، فإن منبرًا للنضال وبرنامجًا للبناء الجماعي للبديل للافتراء والازدراء ، هذا ليس تحديًا أن النخبة الوطنية يجب أن تتعلم دائماً أن ترتفع؟
يبدو أنك تعتقد أن الهياكل الحاكمة للمؤسسات المدنية والعسكرية الحالية هي الآن في أيدي الرجال ذوي المهارات والرؤية والسلامة الأخلاقية والتضحية الذاتية القادرة على تقديم البلد ، التي تواجه تحديات الساعة ، خارطة طريق تعطي الأمل للناس ، وحدة العمل لنخبها والتماسك العالمي.
يشك العديد من الجزائريين في ذلك. خاصة وأن الفضائح ، من خلال تكاثرها ، تشير إلى أن الانحراف قد أصبح القاعدة. كما توضح حالة بوابة الكوكايين بشكل دراماتيكي ، حيث يتحد كبار المسؤولين في الدولة والقضاة والجنرالات والعصابات المبتذلة في المهام العسكرية للجريمة والوظائف السياسية لتحويل الثروة الوطنية لصالحها. لسنوات. في أقصى إفلات من العقاب. وغفوة المؤسسات المسؤولة عن ضمان سلامة الممتلكات والناس.
من الواضح اليوم أن الإلهام من عظمة الثورة ضروري أكثر من الاحتفال بالتواريخ.
ثوري لحظة بامتياز، وهبت المؤتمر Soummam الكفاح المسلح، الناجمة عن دعوة 1 Novembre54، أدوات لا غنى عنها لنشر منهجي ومنظم في جميع أنحاء البلاد من حكم العسكر والسياسية الداخلية على الخارج. بنفس الطريقة التي تم بها التأكيد على توجهاتها الإستراتيجية: الاستقلال
Mais
cela ne concerne pas votre génération ni son système. Ce ne peut être
l’affaire que de patriotes politiquement formés, techniquement
compétents et moralement intègres. A ce propos, vous avez raison quand
vous dites que le peuple algérien aime son armée. Mais vous n’avez
aucune idée du degré de détestation que ce même peuple algérien a pour
ces « Généraux d’Affaires », corrompus et corrupteurs, sans lesquels
jamais n’auraient pu proliférer les « Bouchi » au pays du million et
demi de chahids.
*Journaliste-écrivain, député FFS
http://dia-algerie.com/lettre-politique-de-deputee-ffs-salima-ghezali-general-major-gaid-salah/
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