La thèse de doctorat de Yitzhak Dahan, de l’université Bar-Ilan, sur l’immigration française en Israël est la seule étude exhaustive de ce type sur l’Alya venue de France. Yitzhak Dahan a également travaillé sur les Juifs des pays d’Afrique du Nord – Algérie, Tunisie et Maroc – qui décident d’émigrer en Occident, en particulier en France mais aussi au Canada. Nous lui avons posé des questions sur les Français en Israël. Selon lui, l’une des raisons pour lesquelles l’Alya venue de France devrait baisser de 20 % cette année, c’est peut-être que nous avons atteint le segment faible de ceux qui souhaitent s’installer en Israël. Le segment fort, les gens qui peuvent et veulent investir, vient depuis un moment. C’est la bourgeoisie, les gens qui ont acheté la moitié du front de mer de Tel-Aviv, Laurent Levy, par exemple, qui possède 60 appartements dans le centre de Jérusalem.”
Les personnes qui font leur Alya sont-elles motivées par des considérations sionistes ou économiques pour venir en Israël ?
“On peut dire que leurs motivations sont en grande partie religieuses et sionistes, entre autres en ce qui concerne l’éducation des enfants. Et il y a bien sûr les liens familiaux et l’amour de la plage.”
“Oui, il y a aussi l’antisémitisme et l’augmentation de la population musulmane en France. La France compte actuellement 8 millions de musulmans [en réalité, 4 ou 5 millions de Français seraient musulmans ou de culture musulmane selon le ministère de l’Intérieur français]. Chaque attentat contre les Juifs déclenche une vague d’Alya. L’attentat de Toulouse de 2012, où un professeur et trois enfants ont été assassinés, a été l’un des premiers facteurs à choquer la communauté et à la faire réfléchir. Les gens ont commencé à se demander s’ils avaient bien leur place [en France.
Donc, oui, la sécurité personnelle est un paramètre mais cette communauté est surtout décidée à donner une éducation juive à ses enfants et à vivre dans une communauté juive, quitte à accepter un niveau de vie plus bas. Le gros attentat qui a eu lieu en juillet à Nice, dont la cible n’était pas les Juifs mais la France, a nui au désir d’Alya.”
Que dit la France en tant que pays ? Est-ce que ça l’ennuie que les Juifs partent ?
Après l’attentat de l’Hyper Casher en 2015, on a entendu le Premier ministre Benyamin Netanyahou inviter les Juifs français à immigrer en Israël.
“Manuel Valls, le Premier ministre français, n’a pas tellement apprécié les déclarations de Netanyahou et a répété ces propos désormais célèbres : ‘La France sans les Juifs de France n’est pas la France.’ Pour assurer leur sécurité, les écoles juives sont maintenant des forteresses militaires. Il y a un poste de garde à l’extérieur comme à l’intérieur. De ce point de vue, la France fait tout pour protéger ses Juifs, qui jouent un rôle central dans l’économie.
Et les Juifs ne veulent pas venir [en Israël] parce qu’ils y sont obligés par l’antisémitisme par exemple. Ils disent : ‘Nous voulons tout simplement faire notre Alya.’”
Mais alors pourquoi les Juifs français ont-ils soudainement découvert Israël ?
“Leur lien avec Israël ne date pas de maintenant. Ils ne passaient pas leurs vacances en Tunisie mais ici, alors que ça leur coûtait deux fois plus cher. 80 000 Français envahissent les plages de Tel-Aviv toute l’année”, relève Dahan, avant d’ajouter que les Juifs français veulent aussi investir en Israël. Cette immigration est différente de toutes les autres. On ne vient pas s’installer en Israël pour améliorer sa situation économique.”
Est-ce que leur niveau de vie diminue ?
“Tout à fait. Et parfois ils font la navette entre la maison et le travail. Vous connaissez l’expression ‘Alya Boeing’ ? Vous vous êtes installé en Israël mais vous n’avez pas de source de revenus alors vous allez en France le dimanche et revenez le vendredi. Il y a des avions bourrés de gens qui font ça à l’aéroport Ben Gourion. Une partie considérable des gens qui vivent à Ra’anana (une banlieue de Tel-Aviv) travaille en France, par exemple le dentiste qui se rend chaque semaine à son cabinet et revient le week-end.” Cela génère du revenu mais c’est mauvais pour Israël. Cela crée des problèmes dans les couples. Les enfants ressentent une absence parce que la mère est là mais pas le père. Le problème, c’est que l’économie israélienne ne s’est pas assez ouverte à cette Alya. Il n’y a pas que le phénomène Boeing. Même quand les gens travaillent ici, c’est en général en indépendant. Ils souhaitaient intégrer la société israélienne mais ils finissent par vivre proches les uns des autres.”
Les Juifs français ont-ils du mal à trouver du travail en Israël ?
“Oui, une proportion importante d’entre eux a beaucoup de mal à trouver un emploi parce que certains diplômes qu’ils ont obtenus en France, les diplômes de médecine et d’infirmier par exemple, ne sont pas reconnus en Israël. Ils obtiennent moins que ce qu’ils valent ici. En Israël, il y a 1 000 médecins français qui ont étudié gratuitement en France et Israël les a formés à nouveau. 25 % des dentistes de Jérusalem sont français.”
À Netanya, ce sont en majorité des retraités, surtout originaires de Tunisie. Ils préfèrent le centre de Netanya.”
Et à Ashdod ?
“Ashdod accueillait jadis une population relativement faible du point de vue du capital social car les appartements y étaient bon marché il y a vingt ou vingt-cinq ans. Mais on commence à voir les gens quitter Netanya et Ashdod. C’est l’un des grands changements de 2016. Il y a deux cents familles immigrées à Hadera et il y a des gens, essentiellement des jeunes, qui quittent le centre de Netanya pour des quartiers plus éloignés.”
Dahan relève également que certains immigrés français vont s’installer dans les villes juives de Judee Samarie. Il y a par exemple 150 familles qui vivent à Eli.
Certains pensent que les Français font grimper le prix de l’immobilier en Israël.
“Ils investissent beaucoup mais je ne peux pas dire combien. À Neveh Tzedek [un quartier de Tel-Aviv], il y a des immeubles entiers [de Juifs français] mais il est évident que tous n’ont pas les moyens d’acheter un logement à Tel-Aviv ou Jérusalem.”
Qu’avez-vous découvert d’autre au cours de vos recherches ?
“L’Alya française a dans une large mesure restauré le patrimoine nord-africain. C’est un phénomène fascinant. À Netanya, il y a des synagogues pas simplement pour les Juifs d’Algérie mais pour les gens originaires d’une ville en particulier, Constantine ou Oran. Cela veut dire que, d’un côté, ces gens ont la culture française et, d’un autre côté, ils ont mieux préservé la culture d’Afrique du Nord que les Juifs qui sont venus en Israël dans les années 1950 et 60.” Les premiers immigrés d’Afrique du Nord n’étaient pas seulement incités à devenir israéliens et à laisser le monde religieux derrière eux, mais aussi à abandonner leur patrimoine nord-africain, explique Dahan. “Ce qui est intéressant, c’est que ce sont ceux qui viennent d’Occident, en l’occurrence de France, qui rétablissent les traditions des Juifs du Maroc, d’Algérie et de Tunisie en Israël.”
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Impliqué à de multiples titres par l’histoire de la guerre d’Algérie, en tant que citoyen et cinéaste, en tant que Juif et Algérien, puisque je n’ai quitté l’Algérie qu’en 1993, la Tribune du CRIF accordée à B. Stora en 2014, ne peut me laisser indifférent, comme d’ailleurs l’ensemble des propos de cet historien, juif aussi, mais ayant quitté l’Algérie enfant, une année avant l’indépendance.
Par Jean-Pierre Lledo.
Se donnant, là, pour tache d’expliquer les raisons du départ des 130.000 Juifs d’Algérie, je note avec satisfaction que B. Stora évoque le ciblage des Juifs «…Victimes d’attentats individuels ou collectifs, par des bombes dans des lieux publics, et des attaques à l’arme blanche.» Et même «la dimension arabo-musulmane de l’identité nationale» du nationalisme algérien qui exclut, de fait, tous les non-musulmans du projet de la future Algérie indépendante : le Code de la Nationalité, deuxième loi adoptée en 1963, après la Constitution, stipulera en effet que seuls les musulmans sont automatiquement algériens (l’historien aurait pu le notifier).
Tout cela est en effet d’une autre tonalité que les propos tenus par le même historien, dans le Monde diplomatique de mai 2008. Présenté comme “un des meilleurs historiens de l’Algérie”, B. Stora affirmait : « Depuis qu’ils sont rentrés (sic) en France, les rapatriés (resic) ont toujours cherché à faire croire que la seule raison de leur départ était le risque qu’ils couraient pour leur vie et celle de leurs enfants. Et qu’ils avaient tous été obligés de partir…» Le 26 du même mois, à l’Hôtel de Ville de Paris, lors d’une conférence-débat de l’Association “Coup de soleil’’, à la question : pourquoi vos parents ont-ils quitté l’Algérie ?, il répond agacé : «Mes parents aimaient la France, la France est partie, alors ils ont suivi la France.» Il reste que dans cette Tribune du Crif, aussi, l’historien continue de privilégier cette raison. Il commence par elle et lui consacre l’essentiel de son papier. Pour le résumer: Français par Crémieux, les Juifs tenaient à le rester. L’historien pourra toujours se défendre. Il cite effectivement bien d’autres raisons : dhimmitude, nationalisme, islam, agressivité, durant “la guerre d’Algérie’’… Mais – comment dire… ? – sur un mode mineur d’atténuation, et de façon désincarnée.
La dhimmitude islamique
Selon B. Stora c’était « un mélange de protection et de soumission ! » Ah, seulement ? Et la discrimination, la ségrégation, le racisme, l’apartheid, l’humiliation au quotidien, la rouelle jaune ancêtre de l’étoile des nazis, le coup sur la nuque du représentant de la communauté qui venait apporter l’impôt supplémentaire, la savate qui devait laisser dépasser le talon, les couleurs interdites pour l’habillement, les travaux dégradants, les pogroms à répétition, les conversions obligatoires, etc, etc. ? Après un tel régime, comment les Juifs n’eussent-ils pas sauté au cou des Français ? Paul Fenton et David Litman en ont donné 800 pages de preuves (L’Exil au Maghreb, PUF). Quant au nationalisme : « Stora insiste sur la dimension arabo-musulmane de l’identité nationale. » Il ne ferait qu’insister ? Le nationalisme algérien n’aurait-il usé que de rhétorique ? La première victime, et non la seule, des émeutes de mai 1945, n’est-elle pas une petite juive de 10 ans ? Durant ces émeutes, ne crie-t-on pas dans les rues des villes et des villages “Nkatlou Yahoud” (Tuons les Juifs) ?
B. Stora : « De nombreuses familles juives, ce qui est peu connu, ont été touchées aussi bien comme Juifs que comme Français. » L’historien spécialiste de l’Algérie devrait savoir que du point de vue des fidayîn et des moudjahidine qui tuent au faciès, comme par exemple le 20 Août 1955, encore dans le Constantinois, il n’y a pas de “Français’’, mais uniquement des “Yahoud’’ et des “Nsara’’ (chrétiens). Quand aux Juifs, on les vise bien parce que Juifs. L’historien ne devrait avoir aucun doute là-dessus. N’a-t-il pas écrit lui-même dans “Trois Exils’’ qu’on tuait les Juifs, “de préférence le samedi” ? Et on les vise, selon différents modes opératoires, en les arrosant d’essence dans la rue (David Chiche, 65 ans, Alger), en les tuant à l’entrée ou à la sortie des synagogues (comme à Constantine, quelques mois avant l’indépendance, Edmond Barouch Sirat, frère du Grand Rabbin de France, René Sirat), ou avec des bombes, y compris chez eux (Isaac Aziza, rabbin de Nédroma, tué avec sa famille). Ils sont pourchassés en tout lieu : devant leur magasin comme Emile Atlan (héros de l’Opération Torch, mise au point par des Juifs, qui permit aux Américains de prendre Alger sans combat), à l’intérieur de leur lieu de travail, ou en des lieux de détente (grenades dans les cafés de Constantine) ou de loisir (Casino de la Corniche qui pulvérise notamment l’orchestre de Lucien Séror, dit Lucky Starway)… Les synagogues, elles-mêmes ne sont pas épargnées : grenades dans les synagogues de villes du Sud, Boghari en mars 1958 (1 mort), et Bou Saada en 1959 la veille de Kippour (la petite fille du Rabbin tuée). Celle d’Orléanville est incendiée. La grande Synagogue d’Alger, en décembre 1960, dévastée aux cris de “Mort aux juifs’’, les Rouleaux de la Tora profanés, des croix gammées dessinées sur les murs, et le drapeau indépendantiste planté.
La fin de la guerre d’Algérie.
L’historien nous dit certes qu’elle a été “dramatique”. Pour exemple, il cite « l’assassinat du célèbre musicien Raymond Leyris en 1961. » C’est déjà mieux que dans le grand livre récent qu’il a parrainé avec A. Meddeb, sur les relations entre juifs et musulmans dans le monde arabo-musulman, où le musicien n’est évoqué que pour illustrer la symbiose judéo-arabe, sans que l’on sache qu’il a été assassiné ! (Ce livre exclut même de sa bibliographie, des historiens comme Bat Yé’Or, Weinstock, Fenton, Bensoussan, qui ont été pourtant des pionniers dans l’histoire judéo-musulmane non-idéalisée, sans parler de “La fin du judaïsme en terres d’Islam’’, dirigé par Trigano). Mais l’historien rate une nouvelle occasion de combler un immense trou dans son historiographie de la guerre. En effet, il continue à ignorer ce qu’a été la journée la plus meurtrière de la guerre d’Algérie : 700 morts et disparus à jamais (lire “Silence d’Etat’’ de JJ Jordi). Il s’agit du 5 Juillet 1962 à Oran, premier jour officiel de la célébration de l’indépendance qui venait d’être votée 2 jours plus tôt. Ce jour-là, du matin au soir, on a tué, étripé, démembré, du matin au soir, encore une fois, au faciès. Et naturellement, Oran étant numériquement la ville la plus juive d’Algérie, nombreuses et nombreux furent les “Yahoud’’ assassinés et, à ce jour, disparus. La Yahoudya Viviane Ezagouri, membre comme moi du Collectif 5 Juillet 1962, se tient à la disposition de l’historien pour lui raconter comment, avec son fiancé, elle échappa miraculeusement au lynchage, chance que n’eut guère son père…
Les 130 000 Juifs partis, soit vers la France, soit vers Israël, la nouvelle Algérie “libre’’ va-t-elle les regretter, se les remémorer, les rappeler, leur donner envie de revenir, leur montrer qu’après la guerre et ses horreurs, et la fin du “colonialisme’’ une nouvelle ère de communion pouvait commencer ? Que nous dit l’historien ? « Les pouvoirs successifs ont reconstruit une histoire de l’Algérie en supprimant les traces de toutes les diversités, donc la présence des Juifs dans ce pays. » C’est le moins que le puisse dire ! C’est très peu, trop peu pour signifier que le départ des Juifs, loin de l’atténuer, n’a fait que décupler la judéophobie, surtout depuis la “libéralisation’’ politique et médiatique… Même le président de la république Bouteflika qui avait invité Enrico Macias doit se rétracter ! Les 150 Tlemcéniens qui en 2005 reviennent dans leur ville, déclenchent surtout dans les journaux arabophones, une des plus grandes hystéries antijuives (« Le temps de l’enjuivation ! La façon provocante et plus qu’officielle avec laquelle les Juifs ont été reçus à Tlemcen indique qu’il existe des musulmans, issus de notre sang, qui sont encore davantage enjuivés que les Juifs eux-mêmes. » Ech-Chourouk El-Youmi).
A peu près au même moment, un quotidien national francophone (Quotidien d’Oran), donne 2 immenses pages à un avocat (Lezzar) pour “prouver’’ que Raymond Leyris avait été sciemment liquidé par le FLN, en raison de ses accointances avec l’OAS ! Raymond Leyris et son gendre Enrico Macias sont régulièrement salis dans la presse algérienne. Dans mon film “Algérie, histoires à ne pas dire’’ un musicien qui se présente comme un ancien moudjahid, lance, en parlant de l’assassinat de R. Leyris : « Il ne valait même pas la balle qui l’a tué », tandis que plus prosaïquement, un patron de hammam de Constantine nous dit que chez eux, Arabes et Juifs ne se lavaient pas aux même heures, à cause de “l’odeur’’ de ces derniers… Enfin B. Stora aurait même pu donner un exemple personnel de la judéophilie ambiante : sa participation à la grande rencontre des Constantinois, à Jérusalem en 2005, déclenche une autre avalanche de réactions agressives dans la presse algérienne. On lui demande des comptes. Et fait surprenant, il croit nécessaire d’en rendre…
Les communistes : « Une petite minorité de Juifs, surtout proche du Parti communiste algérien, restera après 1962… Ceux-là aussi partiront dans les années 1990, au moment de la terrible guerre civile… » Comparée aux 9 millions de musulmans et aux 130 000 Juifs de 1962, on pourrait penser qu’il s’agit là d’un millier de personnes, ou même d’une centaine… Or, la “petite minorité de Juifs’’, c’est à peine une dizaine de personnes après 62 ! Le sens de la mesure, ce n’est pas rien en histoire, non ? Quand à ceux qui partirent au début des années 90, il n’y en eut que deux (dont moi). Parce que pour qui voulait voir, les choses étaient visibles dès le début de l’indépendance : en 1963, à Ténès, la Rue Pierre Ghenassia (communiste, infirmier dans les maquis de l’ALN, qui préféra mourir plutôt que fuir – comme le lui proposa son chef, le Cdt Azzedine – et abandonner ses blessés) ne fut-elle pas débaptisée en Rue El Qods ? !
Les choses étaient claires depuis longtemps d’ailleurs. Le communiste juif André Beckouche, constantinois comme Stora, se rappelle que dans un de ces débats d’étudiants algériens à Paris, qu’il situe en 1955, Réda Malek, jeune dirigeant nationaliste, avait ainsi conclu : « L’Algérie, n’est pas un manteau d’Arlequin »… 35 ans plus tard, relatant les négociations sur “Les Accords d’Evian’’ dont il avait été partie prenante (Le Seuil, 1990), il persiste et signe : « Heureusement, le caractère sacré arabo-musulman de la nation algérienne était sauvegardé.» Et les lecteurs doivent savoir que cet homme n’était pas un fanatique, qu’il se voulait un “moderne’’ et qu’il combattit autant qu’il put les islamistes lorsqu’il fut chef du gouvernement en 1994. Quelques années plus tard, lorsqu’il évoque la signature de ces Accords d’Evian, Ben Khedda, qui fut le Président du GPRA de 1958 à l’indépendance, souvent présenté comme un “démocrate’’ face au “dictateur’’ Boumedienne, est encore plus explicite : « En refusant notamment la nationalité algérienne automatique pour un million d’Européens, nous avions prévenu le danger d’une Algérie bicéphale » (La fin de la guerre d’Algérie, 1998 – Casbah Ed).
Les Juifs sont certainement le peuple qui a donné, et continue de donner, à toutes les “révolutions’’ le plus fort contingent d’idiots utiles. C’est un constat. Que je fais en connaissance de cause puisque j’avoue sans fierté en avoir été. Mais quand ils sont censés écrire l’histoire, cette mission ne devrait-elle pas les encourager à distinguer, au moins, entre leur rêve de fraternité et l’histoire réelle, et au plus à se remettre en question ? Auteur en 1969, de “Le sionisme contre Israël’’, considéré par l’extrême gauche comme la Bible de l’antisionisme, l’historien Nathan Weinstock a montré qu’il ne fallait pas désespérer, puisqu’il nous a offert ces dernières années un des meilleurs livres d’histoire qui se soit écrit sur le conflit israélo-palestinien: “Terre promise, trop promise’’.
Enfin, la seule atténuation légitime, mais dont l’historien ne dit mot, est qu’il faut se garder d’identifier le comportement des chefs à celui de tous les individus, parmi lesquels, il y eut comme partout des Justes. Ils furent, comme partout, très minoritaires. Et parmi eux ne brillèrent que très peu d’intellectuels, lesquels dans leur grande majorité ont préféré jusqu’ici emboucher les trompettes de la vindicte et de l’excommunication. Dans le monde arabo-musulman, rapport aux Juifs, l’Algérie n’est certes pas une exception. Déplorant que depuis le jour de son enterrement, plus personne n’ait pu réciter de Kaddish sur la tombe de son frère assassiné, René Sirat l’ancien Grand Rabbin de France, constatait il y a quelques années : « Aujourd’hui, l’Algérie est l’un des rares pays au monde Judenrein ».
http://israelmagazine.co.il/paul-amar-interview-exclusive-pour-israel-magazine/
Entretien réalisé par Lydie Turkfeld.
« Pas un Français ne sera en sécurité tant qu’un Juif, en France et dans le monde entier, pourra craindre pour sa vie » [Jean-Paul Sartre] : partageant ce constat, Paul Amar – journaliste et citoyen – nous livre dans ‘Blessures’ un témoignage bouleversant qui révèle son engagement indéfectible en faveur du “vivre ensemble”. Humaniste, républicain, laïc, Paul Amar est “également” juif. Chacune de ces valeurs le définit, sans le résumer ni l’emprisonner.
Esprit combatif et insoumis, il en appelle aujourd’hui à la vigilance de chacun d’entre nous pour sauver “notre” belle République française. Paul Amar est un journaliste éclectique. Présentateur-vedette du JT, auteur, producteur, il a aussi animé des émissions de débat, des magazines de société ou de décryptage de l’actualité, emblématiques.
Discret, il n’a jamais fait état de sa judéité ; dans années 80, il va cependant être stigmatisé en raison de cette “appartenance”. En parallèle, la France connait une spectaculaire résurgence de l’extrême-droite et de l’antisémitisme et plusieurs tragédies. Alarmé de ce terrifiant engrenage, Paul Amar a décidé de répondre aux maux, par ses mots.
– Lydie Turkfeld : Dans Blessures, vous retracez l’évolution politique et sociétale de la France, des années 50 à nos jours. Trois “fils conducteurs” : votre itinéraire personnel et professionnel ; la visibilité retrouvée de l’extrême-droite et de l’antisémitisme ; votre rapport à la judéité.
Pourquoi avoir choisi le mode du récit ?
– Paul Amar : J’aurais pu choisir une approche plus distanciée mais je suis troublé par le parallélisme entre le contexte actuel et celui de ma propre enfance. Dans les deux cas, nous sommes face à un double antisémitisme : l’antisémitisme d’Etat et l’antisémitisme de rue, dans les années 1950-60 ; l’antisémitisme de salon – de plateaux télévisés – de spectacles nauséabonds et l’antisémitisme de rue, encore, des années 2000-2010.
Aujourd’hui pour moi, Sarcelles c’est Constantine [sa ville de naissance] ; Créteil c’est Alger ; Toulouse c’est Oran. Au bout de la guerre d’Algérie, il y a eu l’exil. Je ne voudrais pas qu’au bout de cette nouvelle “guerre”, il y ait le départ forcé, ou même le départ volontaire, ou le mal-être qui existe déjà. Je suis extrêmement inquiet.
– L’exil en 1961, votre famille s’installe à Villeurbanne, dans une cité où cohabitent “radieusement” plusieurs nationalités. Qu’est-ce qui a changé entre 1961 et 2014 ?
– Dans les années 60, la France veut se réconcilier avec l’Allemagne et construit, avec d’autres, l’Europe ; d’autre part, elle accueille des immigrés et les “pieds noirs”. Et elle est en pleine croissance !
Dans la cité où je vivais, il y avait des Italiens, des Portugais, des Espagnols. La question de l’identité religieuse “supposée”, ne se posait jamais. Les seules différences entre nous, étaient celles de la langue et des recettes culinaires ! Voilà le changement radical : la question de l’origine “supposée” religieuse, se pose aujourd’hui de façon spectaculaire.
– A l’époque, considériez-vous ces différences comme une richesse ?
– Bien sûr ! Nos différences étaient sources d’humour, aussi.
Aujourd’hui elles sont sources de férocité, de moqueries et, parfois, de haine voire de meurtre.
A cela, s’ajoute une période de crise économique qui exacerbe les tensions et radicalise les opinions.
Jusqu’au début des années 80, seuls la politique, l’économie, le social, l’idéologie, faisaient partie du débat. Puis un homme apparaît et déclare : « J’ai le droit de ne pas aimer Simone Veil, Mendès France et Chagall ». C’est Jean-Marie Le Pen…
« Pas un Français ne sera en sécurité tant qu’un Juif, en France et dans le monde entier, pourra craindre pour sa vie » [Jean-Paul Sartre] : partageant ce constat, Paul Amar – journaliste et citoyen – nous livre dans ‘Blessures’ un témoignage bouleversant qui révèle son engagement indéfectible en faveur du “vivre ensemble”. Humaniste, républicain, laïc, Paul Amar est “également” juif. Chacune de ces valeurs le définit, sans le résumer ni l’emprisonner.
Esprit combatif et insoumis, il en appelle aujourd’hui à la vigilance de chacun d’entre nous pour sauver “notre” belle République française. Paul Amar est un journaliste éclectique. Présentateur-vedette du JT, auteur, producteur, il a aussi animé des émissions de débat, des magazines de société ou de décryptage de l’actualité, emblématiques.
Discret, il n’a jamais fait état de sa judéité ; dans années 80, il va cependant être stigmatisé en raison de cette “appartenance”. En parallèle, la France connait une spectaculaire résurgence de l’extrême-droite et de l’antisémitisme et plusieurs tragédies. Alarmé de ce terrifiant engrenage, Paul Amar a décidé de répondre aux maux, par ses mots.
– Lydie Turkfeld : Dans Blessures, vous retracez l’évolution politique et sociétale de la France, des années 50 à nos jours. Trois “fils conducteurs” : votre itinéraire personnel et professionnel ; la visibilité retrouvée de l’extrême-droite et de l’antisémitisme ; votre rapport à la judéité.
Pourquoi avoir choisi le mode du récit ?
– Paul Amar : J’aurais pu choisir une approche plus distanciée mais je suis troublé par le parallélisme entre le contexte actuel et celui de ma propre enfance. Dans les deux cas, nous sommes face à un double antisémitisme : l’antisémitisme d’Etat et l’antisémitisme de rue, dans les années 1950-60 ; l’antisémitisme de salon – de plateaux télévisés – de spectacles nauséabonds et l’antisémitisme de rue, encore, des années 2000-2010.
Aujourd’hui pour moi, Sarcelles c’est Constantine [sa ville de naissance] ; Créteil c’est Alger ; Toulouse c’est Oran. Au bout de la guerre d’Algérie, il y a eu l’exil. Je ne voudrais pas qu’au bout de cette nouvelle “guerre”, il y ait le départ forcé, ou même le départ volontaire, ou le mal-être qui existe déjà. Je suis extrêmement inquiet.
– L’exil en 1961, votre famille s’installe à Villeurbanne, dans une cité où cohabitent “radieusement” plusieurs nationalités. Qu’est-ce qui a changé entre 1961 et 2014 ?
– Dans les années 60, la France veut se réconcilier avec l’Allemagne et construit, avec d’autres, l’Europe ; d’autre part, elle accueille des immigrés et les “pieds noirs”. Et elle est en pleine croissance !
Dans la cité où je vivais, il y avait des Italiens, des Portugais, des Espagnols. La question de l’identité religieuse “supposée”, ne se posait jamais. Les seules différences entre nous, étaient celles de la langue et des recettes culinaires ! Voilà le changement radical : la question de l’origine “supposée” religieuse, se pose aujourd’hui de façon spectaculaire.
– A l’époque, considériez-vous ces différences comme une richesse ?
– Bien sûr ! Nos différences étaient sources d’humour, aussi.
Aujourd’hui elles sont sources de férocité, de moqueries et, parfois, de haine voire de meurtre.
A cela, s’ajoute une période de crise économique qui exacerbe les tensions et radicalise les opinions.
Jusqu’au début des années 80, seuls la politique, l’économie, le social, l’idéologie, faisaient partie du débat. Puis un homme apparaît et déclare : « J’ai le droit de ne pas aimer Simone Veil, Mendès France et Chagall ». C’est Jean-Marie Le Pen…
Suite dans Israël Magazine n°168.
question
Enrico Macias à l'Olympia avant son départ pour l'Algérie
Loisirs - Chansons et souvenirs d'enfance
Enrico
Macias propose ce samedi à l'Olympia un tour de chant consacré à la
musique de son beau-père Raymond Leyris, avant de partir pour l'Algérie
où il donnera six concerts à la mi-mars.
Son «hommage à Cheikh Raymond», paru il y a quelques mois chez Trema, est en lice pour les 15e Victoires de la Musique le 11 mars, dans la catégorie «Album de musiques traditionnelles de musique du monde de l'année». Il est opposé à Cesaria Evora («Café Atlantico»), Natacha Atlas («Gedida»), Idir («Identités») et Bisso Na Bisso («Racines»).
Gendre de Raymond Leyris, Enrico Macias a créé cet hommage au maitre de la musique arabo-andalouse ou maalouf lors du dernier Printemps de Bourges il y a un an. «Toute ma vie d'artiste, je la dois à Tonton Raymond», explique Gaston Ghrenassia, alias Enrico Macias, qui jouait de la guitare au milieu des années 50 dans l'orchestre de ce Juif sépharade de langue arabe.
Ambassadeur de bonne volonté de l'ONU, Enrico Macias souligne que l'influence de la musique arabo-andalouse a toujours existé dans ses chansons, dans «Les gens du Nord» notamment. L'idée de faire revivre la musique de Cheikh Raymond est le résultat d'une rencontre avec un musicien, Taoufik Bestandji, 41 ans, dont le grand père était le maître de Raymond Leyris. Le 12 mars 1999, Enrico Macias présente son hommage à Cheikh Raymond au Centre culturel algérien de Paris. Quelques jours plus tard, le 18 avril, le Printemps de Bourges accueille le spectacle.
Enrico Macias effectuera du 18 au 27 mars une tournée de six concerts en Algérie, la première dans son pays natal qu'il a quitté lors de l'indépendance en 1962. Des personnalités politiques algériennes opposées à la normalisation des relations algéro-israéliennes ont annoncé leur intention de perturber sa tournée. «Je serai en Algérie pour le peuple algérien, pour le président Bouteflika et mon Algérie», a affirmé Enrico Macias au quotidien algérien El Watan.
France 2 proposera un portrait de Cheikh Raymond dimanche soir (23h) dans le cadre de son rendez vous «Les documents du dimanche».
Son «hommage à Cheikh Raymond», paru il y a quelques mois chez Trema, est en lice pour les 15e Victoires de la Musique le 11 mars, dans la catégorie «Album de musiques traditionnelles de musique du monde de l'année». Il est opposé à Cesaria Evora («Café Atlantico»), Natacha Atlas («Gedida»), Idir («Identités») et Bisso Na Bisso («Racines»).
Gendre de Raymond Leyris, Enrico Macias a créé cet hommage au maitre de la musique arabo-andalouse ou maalouf lors du dernier Printemps de Bourges il y a un an. «Toute ma vie d'artiste, je la dois à Tonton Raymond», explique Gaston Ghrenassia, alias Enrico Macias, qui jouait de la guitare au milieu des années 50 dans l'orchestre de ce Juif sépharade de langue arabe.
Retour sur sa terre natale
Raymond Leyris avait 49 ans lorsqu'il fut assassiné le 22 juin 1961, d'une balle dans la nuque, sur le marché de Constantine. Le musicien était un symbole de cette ville située à 200 km au sud est d'Alger, qui comptait alors 40.000 Juifs sépharades, près de la moitié de sa population. Symbole du mariage des cultures occidentales et orientales, Raymond Leyris était né d'une mère bretonne et d'un père juif sépharade, adopté par une famille juive modeste.Ambassadeur de bonne volonté de l'ONU, Enrico Macias souligne que l'influence de la musique arabo-andalouse a toujours existé dans ses chansons, dans «Les gens du Nord» notamment. L'idée de faire revivre la musique de Cheikh Raymond est le résultat d'une rencontre avec un musicien, Taoufik Bestandji, 41 ans, dont le grand père était le maître de Raymond Leyris. Le 12 mars 1999, Enrico Macias présente son hommage à Cheikh Raymond au Centre culturel algérien de Paris. Quelques jours plus tard, le 18 avril, le Printemps de Bourges accueille le spectacle.
Enrico Macias effectuera du 18 au 27 mars une tournée de six concerts en Algérie, la première dans son pays natal qu'il a quitté lors de l'indépendance en 1962. Des personnalités politiques algériennes opposées à la normalisation des relations algéro-israéliennes ont annoncé leur intention de perturber sa tournée. «Je serai en Algérie pour le peuple algérien, pour le président Bouteflika et mon Algérie», a affirmé Enrico Macias au quotidien algérien El Watan.
France 2 proposera un portrait de Cheikh Raymond dimanche soir (23h) dans le cadre de son rendez vous «Les documents du dimanche».
http://israelmagazine.co.il/michele-zerbib-une-artiste-juive-prolifique-et-emue/
Par André Darmon.
Michèle a 54 ans (mais elle en fait bien moins) et est née en Algérie dans cette si fameuse Constantine, fameuse pour son pont suspendu, pour ses femmes de tête, accessoirement pour ses œufs aux anchois et parce que c’est aussi la ville natale d’Enrico Macias. En fait, guerre d’Algérie oblige, Michèle grandira à Lyon, fera ses études supérieures à Nice et se mariera à…. Paris. Notre globe-trotter entreprend ainsi comme beaucoup, des études de droit, sans convictions profondes, parce qu’il lui fallait bien posséder un métier “sérieux”. Puis Michèle se met à la recherche d’un vrai centre d’intérêt, d’une motivation. Sa sensibilité l’attirera inexorablement vers le domaine artistique : elle essayera le théâtre, fera un petit pas vers la danse, puis se mettra à la musique (10 ans de violon). Mais ce n’est toujours pas cela qui l’enthousiasme. Alors.
Elle rencontrera alors un peintre qui lui transmettra le goût et l’envie de la couleur. Elle découvre enfin son Graal, celui qui se fond et se dilue le plus intensément au cœur de sa sensibilité encore inassouvie.
Elle abandonne son métier d’instituteur. Ce sont ensuite ses premières expositions de peintures en banlieue parisienne à Marne la Vallée, précisément. Perfectionniste, elle cherche à approfondir ses connaissances et à développer ses techniques picturales : elle obtient ainsi le diplôme de peintre-décorateur décerné par l’Institut Supérieur des Arts décoratifs de Reims et est engagé par l’Education nationale comme professeur en formation continue dans le domaine de la peinture-décoration.
Elle sera embauchée – ce qui peut tout a fait constituer un véritable et historique titre de gloire professionnelle – afin de peindre les décors d’Eurodisney. Mais l’art en soi ne suffit plus à Michèle Zerbib, s’il n’est pas infusé profondément d’une dimension spirituelle,…
Suite dans le N°153 d’Israël Magazine
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