السبت، يناير 6

L’exception est la règle dans la vie culturelle constantinoise

Par Meriem Merdaci
Y a-t-il ce qu’on appelle assez pompeusement aujourd’hui un agenda culturel qui offre au public, dans la diversité de ses goûts, des sorties quotidiennes de spectacles vivants ou de rencontres culturelles ? Autrement dit, comment se présente le marché de la culture à Constantine au jour le jour ? Point n’est besoin de se perdre en conjectures tant la réponse est limpide et par ailleurs incontestable : il n’existe pas d’offres culturelles quotidiennes et elles existent d’autant moins que les éléments susceptibles de leur donner sens -salles, acteurs, publics- font aussi largement défaut. L’entrée de la maison de la culture Mohamed El Khalifa, désormais squattée à longueur d’année par des expositions d’ouvrages et de CD -souvent religieux- introduira la seule nuance, si l’on admet que ce commerce dont le cadre réglementaire est assez peu visible, nourrit effectivement la vie culturelle locale. Il s’agit alors d’expliquer cette rigidité de la création et de la production culturelles. Constantine reste sans doute encore plus marquée que d’autres grandes agglomérations du pays, par l’état de l’équipement culturel, c’est-à-dire l’absence quasiment de lieux de vie et d’activités culturelles. L’exemple des associations musicales -s’occupant du patrimoine musical citadin ayant plus ou moins pignon sur rue- est édifiant à cet égard puisqu’aucune d’entre elles ne possède de local et qu’elles dépendent des deux salles de la ville. Est-il alors besoin de rappeler que la revendication d’un local figure parmi les plus anciennes et les plus répétées par ces associations depuis leur réémergence au début des années quatre-vingt. La conséquence directe de cette situation est qu’une association peut difficilement exister et se programmer selon ses propres objectifs, l’expérience tentée en 2005 sous forme de coopérative de musiciens renseigne suffisamment sur l’absence de marge de manœuvre, surtout d’autonomie par rapport aux programmations officielles. L’exemple mérite d’être souligné d’autant plus que cette musique est constamment érigée comme vitrine de la vie culturelle constantinoise. Faut-il ajouter à cela la question incontournable des moyens financiers, suite aux délibérations de l’APC de Constantine, qui a décidé d’affecter une enveloppe de vingt millions de dinars au soutien des associations sportives et culturelles locales. Outre la moitié de cette somme destinée aux deux grands clubs de la ville, les quelque sept millions restants doivent être répartis entre le financement de quelques manifestations soutenues par l’APC, des associations à caractère social et enfin une trentaine d’associations culturelles. En chiffres réels, qu’est-ce que cela peut donner, est-ce suffisant pour garantir une activité régulière de spectacles ? Pour le reste -cela exclut évidemment la galerie de peinture et la possibilité d’exposer ou de voir les œuvres de peintres pourtant nombreux qui vivent dans l’indifférence- n’allez surtout pas chercher à Constantine une salle de cinéma qui vous proposerait ne serait-ce que la moitié de ce qui se diffuse à Alger, par exemple. Les expériences tentées par la maison de la culture El Khalifa ou la salle Massinissa du Khroub n’ont pas fait long feu. La litanie peut se décliner sur d’autres registres. Existe-t-il encore des librairies ou un métier de cette discipline en ville ? On comprendra que l’événement -l’exception en somme- constitue la règle à Constantine pour des raisons de forte évidence. L’intérêt est d’abord politique pour les autorités locales et les moyens financiers requis sont souvent obtenus sous forme de subvention de wilaya. Dès lors, tout le monde veut en être et il n’échappe à aucun acteur que le Festival du malouf par exemple est non seulement la seule opportunité à faire valoir, s’il y a lieu, son travail et éventuellement de se faire reconnaître des médias et/ou des pouvoirs publics. L’exception est-elle ainsi bien la règle, le plus remarquable est que ce marché sous contrôle public formate aussi ce dernier, habitué aux invitations, quelque part filtrées par les mêmes organisateurs. Le chemin entre celui qui crée et celui qui consomme apparaît long et incertain à Constantine, et la télévision n’est pas près de perdre son monopole sur les soirées de la vieille Cirta.
M. M.

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